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Affichage des articles du octobre, 2011

sur la tombe d'Apollinaire

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Je me suis enfin détaché De toutes choses naturelles Je peux enfin mourir mais non pêcher Et ce qu'on n'a jamais touché Je l'ai touché je l'ai palpé Et j'ai scruté tout ce que nul Ne peut en rien imaginer Et j'ai soupesé maintes fois Même la vie impondérable Je peux mourir en souriant Habituez vous comme moi A ces prodiges que j'annonce A la bonté qui va régner A la souffrance que j'endure Et vous connaîtrez l'avenir

Marc Le Gros - Passage du héron gris

Si je me fie au ton donné par la citation de François Cheng en exergue, pureté et légèreté vont marquer ce «  passage du héron gri s » de Marc le Gros. Quatrième et dernier volet (après le corbeau, l’aigrette et le cormoran*) d’une tétralogie des oiseaux du halage, Marc Le Gros se place à nouveau en observateur des passagers de l’Odet, ce fleuve breton qui traverse Quimper. Et tout de suite, dès la première page, la proximité avec l’humain écrivant «  C’est qu’on balaye la page du ciel nous aussi / Nos mots ce sont les plumes qu’on laisse / Les livres qu’on jette à la mer / On écrit sur le vide / Comme lui  ». Tout comme l'homme, le héron signe son œuvre de passage d’une trace de pas fragile sur la vase d’un fleuve passé. «  Le beau placé décomposé du pied / Sur le glacis des vases / Cette allure impeccable de celui / Qui voit clair et qui marche / Aussi lent qu'un grand fauve / Sur les œufs des saisons  ». Un pas hésitant, un vol malhabile, un pas d’automne comme un f

collecte d'un été portugais

Fernando Pessoa Salut à Walt Whitman (extrait) […] Je ne peux jamais lire tes vers d'une seule traite… Il y a trop à sentir… Je traverse tes vers comme une foule qui me bouscule, Et je sens des odeurs de sueurs, d'huiles, d'activité humaine et mécanique. Dans tes vers, à un moment donné je ne sais plus si je lis ou si je vis, Je ne sais plus si ma place réelle est dans le monde ou dans tes vers, Je ne sais plus si je suis ici, debout sur la terre naturelle, Ou la tête en bas, pendu par une sorte d'appareil, Au plafond naturel de ton inspiration débordante, Au milieu du plafond de ton inaccessible intensité. […] Herberto Helder Cette main qui trace l'ardente mélancolie de l'âge est aussi celle qui serpente aux sources de la tête, qui ouverte à l'image du monde entre les deux tempes attise le cœur somptueux. ***** Branchies par quoi toute lumière éclose respire, rose, la première. ***** Incertain grandit un poème dans les désordres

Louis Timbal-Duclaux

Mr Timbal-Duclaux, mon regard a été accroché dans mon kiosque sur la une du n°111 du magazine "écrire magazine" qui titrait "Poésie, comprendre et analyser les techniques" et "Poésie et publicité". Je vous reconnais un certain talent dans la publicité puisque ainsi accroché j'ai immédiatement dépensé les 5.90 euros de votre revue. En revanche, je ne partage pas du tout votre opinion sur la poésie. Vos " vérités méconnues sur la publicité et la poésie " s'apparentent plus pour moi à des contrevérités qui traduisent, j'ai l'impression, un manque de connaissance de la poésie et en particulier de la poésie contemporaine. Je vais tenter de vous éclairer sur ce point sans aucune animosité à votre encontre car j'ai trop de respect pour le travail que vous faites pour l'écriture en général. Quand vous dites : " D'un côté la poésie, étudiée dans les cours de français comme l'excellence littéraire même ", c'

Jacques Ancet - Portrait d'une ombre

Faire le portrait d'une ombre ? Chercher le " non-visible qui peu à peu se trame aux lisières du visible " et ce qui se passe entre : " entre ici et ailleurs, entre hier et demain, entre tout et rien. Entre, toujours, entre. Entre le jour, la nuit, ce qui vient, ce qui s'en va - et qui revient toujours ". Tel est le projet annoncé de Jacques Ancet. Mais comme toujours chez les poètes (les grands), un ouvrage ne peut se résumer à un seul projet et le lecteur y trouvera de multiples chemins à explorer. Jacques Ancet est de ces poètes qui pratique allègrement ce que Pierre Mabille disait attendre des poètes " l'étude et l'agrandissement du réel, non sa condamnation ". Étude des petits détails de l'existence pour les agrandir et mieux montrer l'invisible. " Quand dire c'est montrer, les mots sont des doigts ". Il trouve là le moyen de pratiquer une sorte de cubisme littéraire en plaçant dans ce portrait comme le f

Pierre Mabille

Il appartient aux poètes de cesser leur jeu dangereux de sentimentalisme dans les nuées. Nous leurs demandons de revaloriser nos corps décrépis, nos caresses profanées. Nous attendons d'eux l'étude et l'agrandissement du réel non sa condamnation. Pierre Mabille (1904-1952) "Thérèse de Lisieux" cité par Paul Eluard dans " Donner à voir "

Anne de Staël

Sur la corde à linge le pantalon court si vite... trébuche aux nouvelles sur le claquement du journal vent se relève claque tousse La chemise gonfle le torse dans un balancement d'outre ivre ses bras agitent les adieux de gare saccadés secs des adieux aux manches courtes pas assez de tissu pour le retour ! Quelle est cette amarre d'un pôle à l'autre du monde corde courant du pantalon à la chemise retenue par la pince à l'épaule ! Alignée la lessive un mot à mot dans une langue étrangère Habits ? Ou déshabillé ? Habité ? OU vacant ? Il y a sur la corde à linge une bifurcation : disparu et à venir © Anne de Staël " La Remarque de l'ours " éditions Apogée

Antoine Simon

Je parle pour ne rien dire je dis pour ne rien exprimer j'exprime pour ne rien garder je garde pour ne rien perdre je perds pour ne rien attendre j'attends pour ne rien ©Antoine Simon " Ticket à conserver " éditions Plaine Page

Ariane Dreyfus

SI TU MEURS Je n'aurai que la page sur le drap Que des mots Je ne sais pas si je les connais Je sais qu'ils se coucheront © Ariane Dreyfus " La terre voudrait recommencer "

Georges Guillain

Georges Guillain est à Beauséjour ce soir. Sa grande taille habite pleinement la salle de lecture au plafond malgré tout un peu bas. Mais cette maison lui offre ainsi un cocon bienveillant. Et ce soir, ici à Rennes au bord du canal, ce n’est pas que sa taille qui fera impression, mais sa poésie aussi. Georges Guillain a la faconde méridionale de ceux du bord de mer. De la mer du Nord certes, mais du pays des départs vers les vagues et le sel qui rendent les hommes diserts. Il a la faconde du prof en retraite qui a toujours aimé son travail avec la fierté d’un passeur de savoirs. Sa lettre du poète Georges Guillain, resté à Boulogne sur Mer, au lecteur Georges Guillain, en lumière ici à la Maison de la Poésie, est un modèle d’humour schizophrénique, que n’aurait pas renié Woody Allen. Mais à travers l’artifice du double je, point d’artificiel d’un simple jeu. Tout cela est plus profond. Il parle de lui, de son écriture, de la poésie et se présente ainsi immédiatement attachant. Lui

Jacques Josse : Almaty, vol retour

Jacques Josse m’a adressé son dernier livre «  Almaty vol retour  » aux éditions La Digitale. J’aime ce petit voyage en avion de 24 pages entre Kazakhstan et Turquie. Nuit d’encre en plein vol, impressions souvenirs, instantanés de rencontres marquantes. Jacques Josse sait si bien, en quelques textes courts et ciselés à l’humain, nous emmener plus loin. Déjà, avec ses récits de Bretagne, embrumés parfois de pluie et d’alcool, nous partions loin d’ici, alors Almaty vous pensez ! Almaty, Alma Ata, destination rêvée comme Oulan Bator ou bien Vladivostok. L'appel de l'orient. Destination Bosphore en portraits croisés. Vingt-quatre pages d’humanité. De vies simples mais fortes. Un vol ou tout revient en tête. On y croise deux poètes : Ahmed Yasawi et Abaï Kunanbaïouli renommé par les russes, un métro qui n’est pas encore né, une peu de caviar de la Caspienne, un président qui veut donner son nom à une montagne de son pays, un signe de croix à l’envers, une femme qui ne veut

Roberto Juarroz

Chaque texte, chaque mot change selon les heures et les angles du jour et de la nuit, selon la transparence des yeux qui les lisent ou le niveau de marée de la mort. Ton nom n'est pas le même, ma parole n'est pas la même avant et après la rencontre avant et après avoir repensé que demain nous ne serons plus. Toute chose est différente regardée de jour ou de nuit, mais ils deviennent plus différents encore les mots qu'écrivent les hommes et les mots que n'écrivent pas les dieux. Et il n'y a aucune heure, ni la plus prometteuse, la plus lucide, la plus impartiale, ni même l'heure sans quartiers de la mort, qui puisse équilibrer les reflets, ajuster les distances et faire dire aux même mots les mêmes choses. Chaque texte, chaque forme, qu'on le veuille ou non, est le miroir changeant, chatoyant, de la furtive ambiguïté de la vie. Rien n'a une seule forme pour toujours. Même l'éternité n'est pas pour toujours. © Robe

Jean Pérol

Les plus lointains pays ont des antennes douces qui bruissent dans vos songes et le sang de vos nuits mangues filles soleils rouge sans fond d'or et de bronze Les plus lointains pays ont des réveils exacts qui vous sautent au visage tout en griffes de chat poussière tôles dents pourries près des mots obscurcis Les plus lointains pays détournent leurs yeux vastes pleins de mouches mesquines sous des cieux opulents et vous laissent à vos bords où s'endort l'occident. ©Jean Pérol A part et passager éditions de la Différence 2004