"Dans l'interstice" de Jean-Michel Maulpoix
Griffe
encore la page blanche
Tourne
les clés de l'impossible
Ton
cœur est une serrure qui rouille
Souviens-toi
de ce que tu as ailé
A
ce prix tu pourras survivre.
Si
importuns soient-ils
Les
mots sont tout ce qu'il te reste
Habille-toi
de leurs linges.
*
Nulle
part il n'est de ciel à ta convenance
No
de terre qui attende tes os
Ni
de corps qui te délivrera
Ni
d'âme dont tu puisses espérer te vêtir.
Tu
vis dans l'interstice
Entre
la poussière et les dieux
Coincé.
Les doigts pris dans la porte.
Le
cri que tu pousses ne réveillera personne.
*
Nous
sommes les naufragés de la langue.
D'un
pays l'autre nous allons, accrochés aux bois flottés
de
nos phrases.
Ce
sont les restes d'un ancien navire depuis longtemps fracassé
Mais
le désir nous point encore, tandis que nous dérivons
De
sculpter dans ces planches des statuettes de sirènes
aux
cheveux bleus
Et
de chanter toujours avec ces poumons-là
Laissez-nous
répéter la mer
N'inventez
point de procès stupide au grand large.
"Dans l'interstice", Fata Morgana, 1991
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