Chantal Dupuy-Dunier - Cronce en corps

 


"Interroger l’identité, c’est interroger le lieu" écrivait Jean-Michel Maulpoix dans une analyse du recueil Du mouvement et de l’immobilité de Douve d'Yves Bonnefoy. C'est ce rapport entre l'être et le lieu de l'être que Chantal Dupuy-Dunier à choisi d'étudier dans son dernier ouvrage Cronce en corps  publié par les éditions Les Lieux-Dits.

Cronce est ce petit village de Margeride en Haute-Loire (71 habitants au recensement de 2019, peut-être moins depuis...) où l'autrice et sa famille ont choisi de trouver racine. On s'attache à un lieu, le sol devient nôtre même si l'on en n'est pas propriétaire. 

Petit à petit, le lieu prend matière dans les arbres, les oiseaux, les végétaux, les animaux, le vent, la pierre, l’eau, le ciel, la langue, les parfums, la lumière, les bruits, les souvenirs mais aussi le feu qui "crépite encore / d'un râle incandescent".

Puis le lien devient physique : "Cronce, ton "o" est la preuve / de mon cordon ombilical."  Et c'est en cette relation avec le corps que Chantal Dupuy-Dunier explore dans une langue peut-être plus accessible que ces deux figures tutélaires que sont Yve Bonnefoy pour le lieu et Bernard Noël pour le corps.

Prendre lieu c'est faire corps, au tout près des sensations, avec ses origines. L'autrice alors, pour interroger le lieu, interroge le corps : 

"Je respire par tes narines","Tu continues à écrire sur mon visage. Ta rivière continue à creuser son lit dans ma peau."  "Mon corps, façonné par tes saisons", "pétri de ta terre"

Même si un jour il faut se résigner à quitter le lieu

"Le souvenir de tes pierres / apaise la dernière image, / celle d'une cheminée qui ne fume plus."

Cet ouvrage est le dernier volet d'un triptyque où les textes et les belles illustrations de la plasticienne Michèle Dadolle sont très bien mis en valeur par Germain Roesz l'éditeur strasbourgeois au nom tout à fait en rapport avec le propos de l'autrice.


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